L’évitement expérientiel et l’alimentation émotionnelle évitante

Anne-Laure Sanjullian

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Quand on pense à l’alimentation émotionnelle, on imagine souvent la personne qui mange pour se réconforter, se détendre ou calmer un stress. Mais il existe une autre facette, moins connue : l’alimentation émotionnelle évitante. Ici, la nourriture n’est pas utilisée pour « remplir » mais pour fuir ou éviter des émotions jugées trop inconfortables.

Qu’est-ce que l’évitement expérientiel ?

En psychologie, on appelle évitement expérientiel le fait de chercher à fuir ou à contrôler des pensées, des sensations corporelles ou des émotions désagréables, plutôt que de les accueillir.

Exemples d’évitement expérientiel :

  • s’occuper en permanence pour ne pas ressentir l’ennui,

  • se plonger dans les réseaux sociaux pour ne pas penser à une difficulté,

  • ou encore… se tourner vers la nourriture pour échapper à une émotion.

Cet évitement procure un soulagement à court terme, mais il entretient le problème sur le long terme.

L’alimentation émotionnelle évitante

Dans ce cadre, manger ne répond pas à la faim, mais à la volonté d’anesthésier ou d’éviter un ressenti intérieur inconfortable :

  • Anxiété : manger pour éviter de ressentir la tension.

  • Tristesse : manger pour ne pas s’autoriser à pleurer ou à ressentir le vide.

  • Colère : manger pour refouler l’émotion au lieu de l’exprimer.

La nourriture devient alors une stratégie d’évitement, un « pansement émotionnel » qui masque le problème sans le résoudre.

Pourquoi cet évitement pose problème ?
  • Il empêche d’apprendre à gérer ses émotions autrement.

  • Il entretient un sentiment de perte de contrôle alimentaire.

  • Il génère de la culpabilité, qui alimente à son tour le cercle vicieux.

Au lieu d’apaiser durablement, l’alimentation émotionnelle évitante enferme dans une boucle inconfort–manger–culpabilité–encore plus d’inconfort.

Comment sortir de l’évitement expérientiel ?
  1. Prendre conscience du mécanisme
    Identifier quand on mange sans faim et quelles émotions sont présentes.

  2. Accueillir l’émotion sans chercher à la fuir
    Se dire : « Je ressens de l’angoisse / de la tristesse / de la colère. Et c’est ok de la ressentir. »

  3. Trouver d’autres modes de régulation
    Respiration, écriture, activité physique, créativité, relaxation… Des alternatives pour exprimer ou traverser l’émotion.

  4. Pratiquer la pleine conscience
    Observer ses sensations, pensées et émotions sans jugement aide à réduire l’automatisme de l’évitement.

  5. Avancer avec bienveillance
    Le but n’est pas de supprimer l’alimentation émotionnelle d’un coup, mais de mieux la comprendre pour progressivement retrouver un rapport apaisé avec soi et avec la nourriture.

Conclusion

L’alimentation émotionnelle évitante est une forme d’évitement expérientiel qui masque les émotions au lieu de les accueillir. Elle offre un soulagement immédiat, mais entretient le mal-être à long terme. En apprenant à reconnaître et accepter ses ressentis, il devient possible de se libérer de ce schéma et de construire une relation plus sereine avec la nourriture… et avec soi-même.

Un accompagnement psycho-comportemental permet d’apprendre à identifier ces mécanismes et à développer de nouvelles stratégies pour réguler ses émotions autrement que par la nourriture.