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Les injonctions alimentaires reçues dans l’enfance : quelles conséquences sur notre comportement alimentaire ?

Anne-Laure Sanjullian

2 min temps de lecture

Dès le plus jeune âge, l’alimentation occupe une place centrale dans la vie familiale. Les repas ne sont pas seulement un moment pour se nourrir : ils sont aussi porteurs de règles, de traditions, mais parfois aussi… d’injonctions. Ces petites phrases répétées pendant l’enfance peuvent sembler anodines, mais elles laissent souvent une empreinte durable sur la relation que l’on entretient avec la nourriture à l’âge adulte.

Les injonctions les plus fréquentes

Beaucoup d’entre nous ont déjà entendu des phrases du type :

  • « Finis ton assiette, il y a des enfants qui meurent de faim ! »

  • « Mange tes légumes si tu veux ton dessert. »

  • « Les bons/mauvais aliments, ça existe ! »

  • « Tu ne sors pas de table tant que tu n’as pas tout mangé. »

Ces messages, bien intentionnés, visent souvent à encourager l’enfant à manger “comme il faut”. Pourtant, ils transmettent une idée rigide et culpabilisante de l’alimentation.

Comment ces injonctions impactent-elles l’enfant ?
  1. Perte des repères internes : L’enfant apprend à ignorer ses signaux de faim et de satiété, pour se conformer à une règle extérieure. À force, il peut avoir du mal à reconnaître quand il a réellement faim ou quand il est rassasié.

  2. Alimentation sous contrôle : Les repas deviennent associés à l’obligation et non au plaisir. Certains enfants vont développer une résistance (“je refuse de manger”) tandis que d’autres vont se plier, mais en déconnectant leurs sensations.

  3. Culpabilité et rapport conflictuel avec la nourriture : Les injonctions peuvent faire naître des émotions négatives autour des aliments (culpabilité de ne pas finir, honte de préférer le sucré, peur de décevoir).

  4. Risque de compensation plus tard : Une fois adultes, certaines personnes peuvent avoir tendance à “se venger” des restrictions vécues enfant, en surconsommant certains aliments interdits, ou en ayant du mal à s’arrêter de manger.

Les répercussions à l’âge adulte

Ces expériences précoces contribuent à façonner notre comportement alimentaire. Chez certains adultes, cela se traduit par :

  • une difficulté à écouter leurs sensations alimentaires,

  • des régimes à répétition, avec une impression d’échec permanent,

  • une peur du gaspillage qui pousse à finir son assiette, même sans faim,

  • un rapport ambivalent à certains aliments : attirance et culpabilité mêlées.

Vers une relation plus apaisée à l’alimentation

La bonne nouvelle, c’est qu’il est possible de se libérer progressivement de ces injonctions. Cela passe par :

  • Réapprendre à écouter ses signaux de faim et de satiété,

  • Déculpabiliser en se rappelant qu’aucun aliment n’est “interdit” en soi,

  • Changer son discours avec ses enfants, en proposant sans forcer,

  • Se reconnecter au plaisir de manger, sans jugement.

Accueillir son histoire et comprendre l’origine de ses comportements alimentaires permet déjà de prendre du recul et de retrouver de la liberté face à la nourriture.